"On ne naît pas ceci ou cela, on le devient." Une formule-type magnifiée par des auteurs : de Beauvoir, Erasme et Tertullien

Simone de Beauvoir a été une précurseuse en matière d'idées féministes. Son rôle, son influence sont symbolisées par sa célèbre formule : "On ne naît pas femme : on le devient." Qu'exprime cette formule tirée de son ouvrage Le deuxième sexe (1949) ? Le sexe féminin existe au plan biologique, bien sûr, mais la "nature féminine", non. Cette dernière résulte d'une construction, à partir de la manière dont une fille, depuis sa naissance, est censée se comporter socialement. Pour acquérir sa liberté et s'accomplir, la femme doit sortir de cette condition convenue et s'émanciper.

Image de couverture : Simone de Beauvoir en 1967, par Moshe Miner, Wikipédia CC.

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En ciselant son fameux aphorisme, qui vaut d'ailleurs autant pour les hommes que pour les femmes, il est très probable que Simone de Beauvoir ait pensé à celui non moins célèbre du penseur et humaniste hollandais Erasme (1466? - 1536) : "On ne naît pas homme, on le devient." Cette formule figure dans son traité d'éducation De pueris Instituendis (Comment éduquer les enfants), paru en 1519. L'homme, c'est évidemment l'être humain en général. Laissé à l'état de nature, l'homme serait bestial car soumis à ses passions. C'est Dieu qui lui confère l'état de raison. Mais cette qualité ne suffit pas à en faire un être humain accompli. Il faut l'instruire, et l'inscrire à cet effet dans un processus de construction où il acquiert les "humanités" - un mot-clef de la Renaissance -   le savoir, grâce à l'accès aux livres, à la culture et aux leçons dispensées par les maîtres. Les Lettres rendent "bon", voilà la clé.

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Mais Erasme a également "emprunté" sa formule - en la transposant à l'Education - à quelqu'un dont il connaissait les textes : Tertullien (vers 150-160 - vers 220). Ce philosophe et polémiste né à Carthage pendant l'empire romain se convertit au christianisme à la fin du IIème siècle. Ses œuvres à partir de cet évènement en font l'un des plus grand théologiens de la chrétienté en devenir. A ce titre, Tertullien est considéré comme l'un des pères de l'Eglise. Dans son Apologétique (°) destinée au proconsul romain de Carthage, Tertullien dénonce les traitements dont sont victimes les chrétiens. . Il se gausse des dieux et rites honorés par l'Empire. A l'opposé, il célèbre le seul dieu dont tout procède. La conversion est la première manifestation de cette allégeance. Inspiré par Dieu à chaque instant, le croyant ne devient ensuite un bon chrétien que s'il se comporte selon ses préceptes. Et c'est là que Tertullien, qui admet qu'avant sa conversion il faisait partie des incroyants,  résume sa pensée en une formule : "Il fut un temps où nous riions, comme vous, de ces vérités. Car nous sortons de vos rangs. On ne naît pas chrétien, on le devient."

(°) Voir le texte : https://www.tertullian.org/french/apologeticum.htm, et en particulier le chapitre XVIII

Source principale de ces textes : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-idees-claires-de-daniele-sallenave/l-histoire-d-une-formule-179031

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Quelques analogies de pensée dans les citations

- La vie ne consiste pas à se trouver soi-même. La vie consiste à se créer soi-même.  (George Bernard Shaw)

- Vous n'êtes pas ce que vous êtes à raison de votre naissance, mais vous êtes selon vos capacités. (Liam Neeson)

- Nous sommes tous nés ignorants, mais certains travaillent dur à rester stupides. (Anonyme)

- Certains naissent grands, d'autres atteignent la grandeur, et d'autres encore se voient imposer la grandeur. (William Shakespeare)

La nature aide...

- On ne naît pas papillon, on le devient.  (DC)

Et les politiciens s'en inspirent :

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