Ma foi, le sport c'est sain ! Première partie
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Les credo de Jean-Paul Ixe
Ah, pour ça, il s'entretenait ! Et pour s'entretenir, il n'avait besoin de personne. C'est d'abord de son corps qu'il s'agit. Car Jean-Paul Ixe courait de footing journalier en jogging dominical, 5 km pour l'un et 15 pour l'autre. Cela sans oublier le fitness en soirée, pour fortifier ses dorsaux, ses pectoraux et ses abdos. Jean-Paul X avait le culte du ventre plat et le ventre plat des culturistes !
Mais tout sacrifier sur l'autel du sport n'aurait pas suffi à notre ami. Ce qu'il voulait fortifier tout autant, c'était son âme, sa foi déjà puissante. En fait, Jean-Paul Ixe avait deux passions : la passion du sport et la passion du Christ. Les deux conjuguaient santé mentale et santé physique. De la religion, il avait à la fois l'art et la pratique : l'art pour la visite des églises, qui composait la totalité de ses déplacements en France et à l'étranger; il les parcourait en tout sens pour en déchiffrer les vitraux et les reliefs ornementaux; la pratique, ensuite, de tous les rituels liturgiques, dans le rare temps libre qui lui restait encore entre son travail et ses obligations ménagères.
Il arrivait même cependant à concilier ses deux passions : sur ses parcours de course à pied, il ménageait toujours une halte pour l'église. Il y faisait ses étirements, jambe tendue sur les prie-dieu, puis moult génuflexions-extensions devant l'autel, avant de terminer sa course. A la salle de sport, après avoir accompli son programme, il sortait de son sac une bouteille en plastique contenant une boisson énergisante coupée d'eau bénite, laquelle lui avait été fournie par son curé moyennant quelques deniers du culte supplémentaires.
Dire qu'ainsi notre homme était heureux, était peut-être exagéré. Viser la plénitude dans le sport était trop ambitieux au regard de ses moyens physiques quels que fussent ses efforts. La plénitude de l'âme paraissait inatteignable car on ne la connaît qu'à la fin du parcours terrestre, et encore. Quant à viser deux plénitudes, pensez donc ! Ce n'est pas à la portée du premier humain venu.
A défaut de plénitudes de haute tenue, Jean-Paul Ixe aurait pu trouver un complément dans les délices de la chair et du mariage. Mais sur ce plan, le bilan était chiche ! Sa vie amoureuse n'avait guère été heureuse; il n'avait folâtré qu'avec des sportives, voire des sportives en chambre, mais hermétiques à la foi, et des bigotes dont la pratique sportive se limitait au lever-assis à la messe. Avec le temps, Jean-Paul Ixe s'était donc convaincu que son équilibre personnel n'avait d'autre objectif que l'accomplissement aussi exigeant que scrupuleux de ses deux passions entrecroisées.
Mieux, cela lui faisait deux credo à défendre. Et à la face des dénigreurs du sport comme des contempteurs de la foi, il n'hésiterait pas à clamer haut et fort : "J'ai foi en Dieu et dans la santé par le sport". Ce que Jean-Paul Ixe résumait d'une formule : "Le sport, c'est la sainteté !"
Daniel Confland
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